Sacrifice Maya : Le rituel religieux

Cet article est une vulgarisation (simplification) issue de l’article paru dans PLOS ONE le 25 septembre 2014 intituler : « Classic Maya Bloodletting and the Cultural Evolution of Religious Rituals: Quantifying Patterns of Variation in Hieroglyphic Texts ». Il a été rédigé par Jessica Munson, Viviana Amati, Mark Collard, Martha Marcri.

Pratique rituelle : Le sacrifice

On pense souvent que le sacrifice maya était forcément la mort d’une personne. Cependant, au travers de l’étude des hiéroglyphes présents sur de nombreuses fresques, on réalise que les Mayas pratiquaient la saignée afin de donner son sang lors de rituels religieux.

Ces rituels douloureux étaient censé être des signes d’engagements essentiels de la part de la noblesse maya.

L’article est une étude visant à analyser la variation temporelle et spatiale de ces rituels de saignées.

L’étude a échantillonné un dossier de 2 480 textes hiéroglyphiques ou le mot ch’ahb’ qui est associé à la saignée rituelle. Les rituels de saignée par les nobles mayas n’étaient pas enregistrés de manière uniforme, mais étaient généralement documentés en association avec des déclarations antagonistes et peuvent avoir signalé des engagements royaux entre des politiques connectées.

Des preuves archéologiques et historiques abondantes soutiennent la prévalence de pratiques religieuses impliquant des sacrifices de sang dans toute la Méso-Amérique avant l’arrivée des Espagnols (LOPEZ LUJAN, 2010 ; TIESLER, 2007). Ceux-ci incluent une variété de comportements rituels impliquant des formes non mortelles de saignées et de piercings corporels, ainsi que des pratiques mortelles de sacrifice humain et animal, d’extraction du cœur et de décapitation. Le sacrifice rituel était un instrument principal d’intégration sociale et de légitimité politique qui recoupait les pratiques militaristes et marchandes, ainsi que les croyances sur l’ordre cosmologique (CARRASCO, 1999). Les sociologues et les anthropologues ont longtemps avancé des arguments similaires selon lesquels les rituels intenses renforcent la cohésion sociale et favorisent la coopération pour la société humaine (DEMAREST, 1984 : 227-243 ; IRON, 2001 : 292-309).

sacrifice maya
Maya Lintel from Yaxchilan in Mexico 600-900AD, British Museum, London, England /442-10764

Pratique de la saignée

Bien que le sacrifice humain soit sans doute moins courant dans l’ancienne société maya, des preuves physiques indiquent que les offrandes de sacrifices d’enfants et d’autres rituels impliquant la décapitation étaient des pratiques religieuses importantes au cours de la période classique (HOUSTON, 2010 : 169-193 ; ARDEN, 2011 : 133-145). Cependant, les scènes de saignées personnelles et de captifs mutilés illustrent d’avantage la gamme de rituels sacrificiels au sein de la société maya classique (BAUDEZ, 2007 : 71-85 ; SCHELE, 1984 : 7-48). Les rituels de saignée impliquaient de percer ou de perforer différentes parties du corps à l’aide d’une variété d’instruments. Les représentations iconographiques et figuratives de la période classique montrent des individus se perçant la langue ou le pénis pour prélever du sang dans des actes de sacrifice personnel. On les trouve aussi dans les codex postclassiques qui incluent également des images de perforation du pénis et de saignement des oreilles, ainsi que d’autres représentations de sacrifice humain qui ont été associées au calendrier maya. Enfin certains des objets représentés dans ces scènes d’effusion de sang qui comprennent : des bols avec des lancettes, des épines de galuchat (un cactus), des lames d’obsidienne et de silex, des poinçons en os, de la corde et du papier d’écorce, ont été récupérés lors de fouille archéologique.

La représentation et l’enregistrement des rituels de saignée sur les monuments publics envoient des messages puissants, sinon visibles, sur le statut et le rôle des dirigeants mayas classiques et de leur progéniture. Les actes rituels de sacrifice de sang sont traditionnellement considérés comme un devoir central pour les rois mayas divins. La recherche actuelle soutient qu’il s’agissait de rites de passage nécessaires qui légitimaient le droit d’un individu à régner dans la société maya classique (STUART, 1984 : 6-20 ; HOUSTON, 2009 : 149).

Les références de sacrifice dans l’iconographie

Les documents ethnohistoriques indiquent que ces pratiques étaient omniprésentes dans la plupart des classes sociales en Mésoamérique. Ils sont donc un des thèmes dominants dans l’art et l’archéologie précolombiens, et sont un sujet essentiel pour comprendre le développement des premières sociétés complexes en Mésoamérique. Bien que de nombreux chercheurs reconnaissent que les rituels sacrificiels impliquant le dévouement de vies humaines et de sang à des êtres surnaturels étaient essentiels à la fondation religieuse et à l’ordre politique des sociétés mésoaméricaines (CARRASCO, 1999 ; SCHELE, 1986) , les explications des évolutions culturelles des comportements n’ont pas été étudiées. L’article se concentre sur la distribution et la propagation des rituels de saignée enregistrés dans les textes hiéroglyphiques mayas classiques.

Pour la période classique, des images de saignées gravées dans des monuments en pierre et peintes sur de la poterie illustrent des scènes pour d’importants rituels dynastiques, qui servaient à diverses fins associées aux cérémonies agricoles, à la communication des ancêtres, aux actes métaphoriques de procréation, ainsi qu’à d’autres obligations royales.

Des références à la saignée ont été identifiées à partir de 2480 éléments architecturaux . Pour assurer la fiabilité spatiale et temporelle, ils ont limité l’échantillon à 72 sites dans la région sud maya où des monuments hiéroglyphiques ont été produits pendant la période classique (278–889). Cela représente 909 monuments ou ils ont identifié 89 exemples du glyphe ch’ahb’ , dont 69 semblaient être directement associés à l’effusion de sang.

Les monuments de pierre inscrits situés sur les places centrales des anciennes villes mayas peuvent être interprétés comme d’importants transmetteurs d’informations culturelles. Fraser Neiman soutient que les stèles mayas constituent des mises en avant fiables, bien que inutiles, de la capacité d’un dirigeant à surpasser ses voisins politique (NEIMAN, 1997 : 267-290).

CONCLUSION

L’article indique que les déclarations de saignées enregistrées sur les monuments varient sensiblement dans l’espace et dans le temps. 42% des saignées documentées sont enregistrées à Copan et Yaxchilan. L’étude se penche aussi sur les liens entre les sites. Ils ont observé s’il y avait la présence de glyphes de noms de lieux dans les déclarations permettant ainsi de souligner les relations sociales ou politiques. Les résultats indiquent une corrélation forte entre les sites pratiquant la saignée. Ils indiquent aussi que le rituel de la saignée ne devait pas être aussi diffusé qu’on le pense. Les chercheurs ont identifié que cette pratique était mentionnée lors de déclarations antagonistes à la guerre. On peut donc supposé que le rituel était associé à la guerre et non à l’ascension d’un souverain (SCHELE, 1984 : 7-48).

Clément Goullin – L’Agence Archéologique


BIBLIOGRAPHIE

ARDEN

2011 Empowered Children in Classic Maya Sacrificial Rites. Childhood in the Past 4: 133–145.


BAUDEZ, Claude

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CARRASCO

1999 City of Sacrifice : L’empire aztèque et le City of Sacrifice: The Aztec Empire and the Role of Violence in Civilization. Boston: Beacon Press.


DEMAREST

1984 Mesoamerican Human Sacrifice in Evolutionary Perspective. In: E. H Boone, editor editors. Ritual Human Sacrifice in Mesoamerica. Washington, D.C.: Dumbarton Oaks Research Library and Collection. 227–243.Dumbarton Oaks, p. 227-243.


HOUSTON,

2010 La ofrenda maxima: el sacrificio humano en la parte central del area Maya. El sacrificio humano en la tradicion religiosa Mesoamericana.

2009 A Splendid Predicament: Young Men in Classic Maya Society. Cambridge Archaeological Journal 19, p. 149.


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2001 Religion as a hard-to-fake sign of commitment. In: R Nesse, editor editors. The evolution of commitment. New York: Russell Sage Foundation, p. 292–309.


LOPEZ LUJAN

2010 El sacrificio humano en la tradición religiosa mesoamericana. México, DF : Instituto Nacional de Antropología e Historia, Universidad Nacional Autónoma de México.


MUNSON, Jessica, et Viviana Amati, Mark Collard, Martha Marcri

2014 « Classic Maya Bloodletting and the Cultural Evolution of Religious Rituals: Quantifying Patterns of Variation in Hieroglyphic Texts« , PLOS ONE.


NEIMAN

1997  Conspicuous consumption as wasteful advertising: a Darwinian perspective on spatial patterns in Classic Maya Terminal monument dates. Evolutionary Theory in Archaeological Explanation. 7: 267–290.


SCHELE

1986 The Blood of Kings: Dynasty and Ritual in Maya Art. Fort Worth: Kimbell Art Museum

1984 Human Sacrifice Among the Classic Maya. In: E. H Boone, editor editors. Ritual Human Sacrifice in Mesoamerica. Washington, D.C.: Dumbarton Oaks Research Library and Collection. 7–48.


STUART,

1984 Royal Auto-Sacrifice among the Maya: A Study of Image and Meaning. RES: Anthropology and Aesthetics: 6–20.


TIESLER,

2007 New Perspectives on Human Sacrifice and Ritual Body Treatments in Ancient Maya Society. New York: Springer.

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